De mère en fille : une aventure familiale au sein de La Chorba

Rose Belladjel est la maman de Nezha, notre responsable logistique. Lorsqu’elle parle de sa mère, Nezha évoque une femme forte, très instruite et investie pour aider son prochain. « C’était l’ainée de sa fratrie. Elle avait de grandes valeurs humaines et essayait tant bien que mal d’aider tout le monde. À l’époque, elle s’était même proposée pour donner des cours d’alphabétisation aux bénéficiaires de La Chorba qui peinait à lire et écrire. » Si on vous parle d’elle aujourd’hui c’est parce que le 28 mars marque la date anniversaire de son décès. Rose était la première cuisinière salariée de La Chorba. Elle a connu les débuts, sa présence y a marqué les esprits et animé la détermination de sa fille.
Dans les années 70, Rose vient régulièrement à Paris pour venir voir son mari qui y est expatrié.
Elle profite de ces allers retours pour suivre une formation d’esthéticienne, un grand écart avec sa carrière de professeure de français en Algérie. Au fil des ans, les va-et-vient s’amenuisent et Rose s’installe définitivement à Paris avec ses enfants. 
Sur place, Nezha ouvre un institut de beauté rue de Wattignies dans le 12è arrondissement. Sa formation d’esthéticienne dans la poche, Rose aide sa fille pour la gestion de la boutique. Pendant plusieurs années elles vont travailler en binôme et Rose soutiendra sa fille alors jeune maman, une entreprise familiale qui les soude encore plus
En 1998, le bail de l’institut arrive à son terme, et Rose prend sa retraite pendant que Nezha, incapable de rester en place, débute une formation dans le tourisme. « On aime les voyages chez nous, alors ça me semblait être une bonne idée. »
C’est pendant cette période de transition que leur aventure avec La Chorba débute.
Un samedi ensoleillé de 2003, Nezha berce son fils et aperçoit de l’agitation depuis sa fenêtre, de l’autre côté du boulevard Poniatowski. Son regard s’arrête et elle interpelle sa mère pour aller voir ce qui se passe.

« Ni une, ni deux, elle s’est habillée, a descendu les escaliers pour traverser la rue (à l’époque il n’y avait pas le tramway, on traversait le boulevard en deux temps, trois mouvements), et est allée à la rencontre de l’association. »

Des caisses remplies de produits, des bénévoles qui s’agitent, d’autres qui discutent avec des familles…  Rose découvre les distributions de colis alimentaires, qui aiguisent son envie de faire du bénévolat.
Elle se rapproche des bénévoles et sympathise très rapidement avec eux pour pouvoir revenir les aider. Nezha se souvient encore du retour de sa mère à ce moment-là, un sourire rayonnant sur le visage. « Elle était tellement contente »
 
 
Suite à cette rencontre, elle devient bénévole et une nouvelle aventure commence pour elle : elle se lève tous les jours au petit matin pour encadrer les bénévoles et préparer tous ensemble les repas du jour (où elle y retrouve d’ailleurs Hakima, aujourd’hui encore bénévole). On la retrouve beaucoup en cuisine – à l’époque très sommaire, loin de ce qu’on peut connaitre aujourd’hui – où elle épluche des tas d’oignons à la bonne franquette, laissant apparaitre quelques larmes, mais aussi sur les distributions du quai d’Austerlitz où sa fille la rejoint quand elle le peut.
Quelques temps plus tard, l’action de La Chorba se professionnalise : une cuisine professionnelle est installée et Rose devient la première cuisinière salariée de l’association. Le reste de sa fratrie s’investit aussi sur le projet, sa sœur vient lui prêter main forte bénévolement ainsi que son frère qui devient, pendant un temps le chauffeur-livreur des camions de l’asso.
Observant l’implication grandissante de sa mère et du reste de la famille, Nezha rejoint le mouvement. Lorsqu’elle ne peut pas participer aux distributions, elle passe la tête en cuisine avec son deuxième fils pour donner un coup de main et papoter avec sa maman. Ensemble, elles ont créé de nombreux souvenirs à La Chorba, et quand on demande à Nezha celui qu’elle chérit le plus, elle nous raconte la préparation du forum associatif du 12ème arrondissement :

« On a participé 2 années consécutives et on se retrouvait pour préparer des gâteaux à vendre sur le forum. On aurait dit qu’on préparait une fête, comme un mariage. Chacun mettait la main à la pâte dans une superbe ambiance. On se retrouvait tous, on se racontait nos vies respectives, c’était de super moments. »

 
Autant de souvenirs qui l’animent aujourd’hui encore et qui expliquent son incroyable implication.
« C’était comme un défi que je me suis lancée une fois que maman était partie, une façon de rester dans le même contexte que de son vivant. »
Continuer d’aider ceux qui en ont besoin est une seconde nature pour Nezha. C’est est une satisfaction personnelle mais c’est aussi, et surtout, un hommage continu envers sa maman, décédée il y a 15 ans (nous pensons encore fort à elle aujourd’hui).
 
De cette relation fusionnelle et des valeurs transmises, Nezha n’a rien perdu. C’est encore avec beaucoup d’émotion qu’elle parle de celle qui l’a élevé et dont elle a le même sourire.
Aujourd’hui, Nezha continue ce que sa mère a commencé : après plusieurs années de bénévolat, elle devient salariée en 2007 pour soutenir Rim sur les colis alimentaires et rapidement son énergie débordante et sa force infatigable l’amènent à gérer la logistique de l’association.
19 ans après le début de cette histoire familiale, Nezha reste guidée par l’envie d’imaginer que, de là où elle est, sa mère est fière d’elle.
En tout cas, nous on l’est.